Listen La rafle 2010 Soundtrack Buy Movie Buy Movie Play Title Artist Buy song TombĂ© du ciel Charles Trenet performer,writer,composer Ein Kleiner Akkord Zarah Leander performer Guenther Schwenn performer Peter Igelhoff performer Insensiblement Paul Misraki composer,writer TombĂ© du ciel Albert Lasry composer Tout en flĂąnant Louis Poterat writer Quand un vicomte Ray Ventura performer Insensiblement Ray Ventura performer Quand un Vicomte... Ray Ventura performer Quand un vicomte Mireille composer Quand un Vicomte... Mireille composer Quand un vicomte Jean Nohain writer Quand un Vicomte... Jean Nohain writer Tout en flĂąnant AndrĂ© Claveau performer Automne Alix Combelle performer Paris Ădith Piaf performer L'or du Rhin - prĂ©lude Richard Wagner writer,composer Clair de Lune Claude Debussy writer,composer Valse op. Posthume en La mineur FrĂ©dĂ©ric Chopin writer,composer Concerto for violin and orchestra Philip Glass composer Ulster Orchestra performer Ătats d'Ăąme Edvard Grieg writer,composer Concerto de l'adieu Georges Delerue composer L'or du Rhin - prĂ©lude Berliner Philharmoniker performer Herbert von Karajan performer Ătats d'Ăąme The Academy of St. Martin-in-the-Fields performer Germany George Wilson performer Ătats d'Ăąme Neville Marriner performer Operation terminated John Ottman writer La Savane Op. 3 Louis Moreau Gottschalk writer,composer Ătats d'Ăąme JĂ©rĂŽme Lemonnier composer Clair de Lune Kate Dillingham performer Richard Canavan performer Related movies...
- áȘĐ°Ń Îžá±Ï ŃáŃ
- ĐŐšÏŐÖᏠжДá§á Đ”ÎłĐ”ĐœŃαпáš
Description OTHER LIVES CONDUTEUR ET PARTIESCompositeur Oliver WaespiOther Lives est une composition idĂ©ale pour un concours mais peut Ă©galement ĂȘtre programmĂ©e comme Ćuvre de concert. Les sombres accords qui ouvrent la piĂšce sont dĂ©rivĂ©s de Der DoppelgĂ€nger », lâune des derniĂšres chansons de Franz Schubert. AprĂšs un court dĂ©veloppement, la musique sâaccĂ©lĂšre et trouve sa propre forme, sâĂ©loignant progressivement de lâintroduction. Lâensemble de la premiĂšre partie, Rage », est de nature trĂšs agitĂ©e. Le passage suivant, Reflection », retourne Ă la progression dâaccords du dĂ©but, avant une sĂ©rie de solos qui explorent le temps et lâespace Ă un rythme plus modĂ©rĂ©. AprĂšs un autre Ă©lan musical, la musique est presque rĂ©duite au silence avant lâarrivĂ©e de la troisiĂšme partie, Redemption ». Ici, un large champ sonore se dĂ©ploie et fait discrĂštement allusion Ă une autre Ćuvre de Schubert, RĂŒckblick ». AprĂšs cet adieu, une transformation musicale abstraite engendre de nouvelles Ă©motions, les motifs lugubres du dĂ©but Ă©tant maintenant inversĂ©s pour produire un paysage harmonique beaucoup plus lumineux. En outre, dans la derniĂšre partie de la piĂšce, Renewal », lâatmosphĂšre tendue de la premiĂšre partie se transforme pour dĂ©gager une grande Ă©nergie. Other Lives est une commande du Valaisia Brass Band, basĂ© en et parties pour fanfare DĂ©tails du produit RĂ©fĂ©rence DHP-BMP20013714Lesarchives par sujet : concert de jean claude crystal Musique, Musique classique, Concert, Spectacle Hendaye 64700 Le 23/08/2022. JEAN-FRANĂOIS HEISSER, piano Chickering 1868 - FrĂ©dĂ©ric CHOPIN (1818 - 1849) - Deux Polonaises Op 26 - Johann-Sebastian BACH (1685 - 1750) - PrĂ©lude en mi bĂ©mol mineur - FrĂ©dĂ©ric CHOPIN (1818 - 1849) - Deux Polonaises Op 40 -
En 1959, Ă vingt-six ans, je me prĂ©parais Ă tourner mon premier long-mĂ©trage, Les Jeux de lâAmour, et je cherchais un compositeur. Par hasard, je suis tombĂ© sur un film publicitaire Maggi oĂč des vaches folles ? dansaient sur un rythme de french-cancan ! Je me suis dit âVoilĂ ce quâil me faut câest vif, enlevĂ© et tonitruant !â Henri Colpi, rĂ©alisateur de cette pub, mâa prĂ©cisĂ© quâil sâagissait dâun jeune garçon trĂšs prometteur, Georges Delerue. Pas de bol il avait dĂ©sertĂ© Paris pour des vacances dans le Midi. Jâai bondi dans un train pour le traquer dans sa villĂ©giature, Ă Saint-Jeannet. Je revois sa petite bicoque provençale, en location, mais avec un piano. Il mâa ouvert la porte je faisais tellement jeune quâil mâa pris pour un coursier ! On a parlĂ© du film, je lui ai dit deux ou trois mots du sujet, en Ă©voquant la possibilitĂ© dâune valse pour le gĂ©nĂ©rique. Il sâest aussitĂŽt mis au piano âUne valse comme celle-lĂ ?â Ca y est, il avait trouvĂ© sa valse avait quelque chose de guilleret, dâĂ©lĂ©gant, avec un arriĂšre-goĂ»t de tristesse. A partir de ce jour, jâai Ă©tĂ© incapable de me passer de Georges, de lâhomme et du compositeur. Pourquoi une valse ? Je lâignore⊠A vingt-six ans, jâĂ©tais dĂ©jĂ un vieux con, totalement en dehors du coup ! rires Comme je me mĂ©fie terriblement de la mode, jâessaye de mâappuyer sur des rĂ©fĂ©rences durables. En plus, quand vous avez un compositeur comme Delerue, vous ne lui demandez pas du disco ou du hard-rock ! Mais, câest vrai, Georges sâaccordait Ă trouver des correspondances entre mon univers et la valse un mouvement perpĂ©tuel, une ronde des sentiments oĂč rien nâaccroche, oĂč tout se dĂ©tache⊠Beaucoup de thĂšmes quâil mâa composĂ©s sont bĂątis sur des rythmes Ă trois temps Le Roi de CĆur, Les Tribulations dâun Chinois en Chine⊠sans parler de mes trois premiers films, interprĂ©tĂ©s par Jean-Pierre Cassel Les Jeux de lâAmour, Le Farceur et LâAmant de Cinq jours. Puis est arrivĂ© Cartouche, qui mâa Ă©tĂ© proposĂ© par les producteurs Alexandre Mnouchkine et Georges Dancigers des Films Ariane. Cartouche a marquĂ© une vraie transition dans ma carriĂšre je passais de marivaudages Nouvelle Vague Ă un cinĂ©ma-spectacle, historique, dâaventures. Et lĂ , jâai dĂ» batailler ferme contre Mnouchkine qui me suggĂ©rait fortement Georges Van Parys ou Paul Misraki. Deux vĂ©tĂ©rans contre un jeunot qui, Ă lâĂ©poque, nâavait pas encore fait ses preuves dans le registre Ă©pique. Jâai fini par avoir gain de cause, Ă lâusure. Delerue a merveilleusement rĂ©ussi la partition de Cartouche et, Ă partir de lĂ , Mnouchkine nâa plus jurĂ© que par lui. Physiquement, Delerue avait un cĂŽtĂ© un peu cassĂ©, avec une grande tĂȘte, au visage trĂšs expressif. Il venait du Nord et ressemblait aux paysans flamands de Bruegel. Ses origines modestes ne rendaient pas pour autant son comportement âpopulaireâ. Au contraire, Georges Ă©tait simple mais bien Ă©levĂ© et trĂšs chaleureux. Il y avait chez lui une grĂące qui me touchait beaucoup. Alexandre Mnouchkine disait souvent âDelerue est lâhomme le plus heureux que jâaie rencontrĂ© !â Il avait raison Georges aimait profiter de sa famille, de la musique, de la bonne chĂšre, sans se compliquer lâexistence. Parti de rien, il savait apprĂ©cier ce qui lui arrivait, un certain confort apportĂ© par la rĂ©ussite. Il prenait vraiment la vie au premier degrĂ©. Je ne lâai jamais entendu disserter sur son travail, lâexpliquer, lâanalyser. PlutĂŽt que de pĂ©rorer sur la musique, Georges prĂ©fĂ©rait en Ă©crire. Quand jâai dĂ©marrĂ©, on Ă©tait en pleine Ă©poque des Branquignols, dont les spectacles Ă©taient mis en musique par un compositeur que Delerue respectait beaucoup, GĂ©rard Calvi. CâĂ©taient des films comiques avec des musiques comiques, dâun burlesque totalement assumĂ©. Moi jâadorais ça⊠mais pas pour moi. Car, Ă mes yeux, la comĂ©die est basĂ©e sur une façon drĂŽle de voir des choses graves. Georges comprenait pleinement cette dĂ©marche il mettait dans mes films tout ce que je ne parvenais pas Ă y mettre moi-mĂȘme, sans doute par pudeur. Pourtant, jâai longtemps rĂȘvĂ© de raconter des histoires tragiques⊠mais lâhumour ou la dĂ©rision mâont presque toujours rattrapĂ©, dĂ©tournĂ©, pris en otage. Heureusement, mon Georges Ă©tait lĂ pour me ramener vers la gravitĂ©. Car voilĂ son gĂ©nie rendre palpable, derriĂšre un vernis de lĂ©gĂšretĂ©, une insondable tristesse, une impression de la fragilitĂ© des ĂȘtres et des choses, que tout est perdu ou va se perdre⊠Le regard et lâapport de Delerue, câĂ©tait tout ce que je nâosais pas exprimer, tout ce que jâavais retenu au scĂ©nario ou au tournage. Pour caricaturer, jâĂ©tais la dĂ©sinvolture, la superficialitĂ©, il Ă©tait la profondeur. Dans une comĂ©die comme Le Diable par la Queue, sa musique apporte une Ă©poustouflante dimension de tendresse, de mĂ©lancolie⊠à travers une valse lente, pour piano et cordes, que joue Ă lâimage le personnage de Jeanne Clotilde Joanno. Câest Ă cause de ce thĂšme que Yves Montand sâĂ©prend dâelle brusquement, il cesse de faire le clown et lui raconte sa vie dâescroc minable. Quand une femme vous joue cette valse, vous ne pouvez que tomber amoureux ! Ce thĂšme de Jeanne, câest peut-ĂȘtre lâun de mes morceaux prĂ©fĂ©rĂ©s de Georges⊠Je voudrais quâon le joue Ă ma messe dâenterrement ! rires Dans Le Diable, jâaime Ă©galement le gĂ©nĂ©rique dĂ©but, un habile dĂ©tournement de musique de cour. On devrait lâentendre sur les grandes eaux Ă Versailles⊠Or, Ă lâimage, on voit un chĂąteau dĂ©crĂ©pi, dont le toit pisse comme une vache, obligeant Jean Rochefort Ă jongler avec les pots de chambre. Câest une autre façon de concevoir les grandes eaux ! Par effet de dĂ©calage, la musique dĂ©cuple le dĂ©risoire de cette famille dâaristos dĂ©cavĂ©s dans leur manoir miteux⊠Jâai aussi en tĂȘte, dans LâHomme de Rio ou Les Tribulations dâun Chinois en Chine, une musique qui nâhĂ©site pas Ă jouer le jeu du suspense ou de la poursuite. Quand on fait de la caricature, il faut y croire. Sinon, on tombe dans la parodie ricanante. La musique de Delerue fait comprendre que nos mĂ©chants de convention sont quand mĂȘme des mĂ©chants. Bien sĂ»r, on rit mais il faut malgrĂ© tout avoir peur. Dans Le Chinois en Chine, jâaime bien le thĂšme gĂ©nĂ©rique, un savoureux croisement entre la valse française et les mystĂšres de lâAsie⊠Pour ĂȘtre franc, je prĂ©fĂšre la musique au film ! Je sais que les enfants lâont adorĂ© mais câest un pastiche outrĂ©, un super-Barnum caricatural trop de pirouettes, trop dâextravagances, trop de fantaisie appuyĂ©e. Ma singularitĂ©, ce ne sont pas les cascades et le gros comique. Câest plutĂŽt une maniĂšre funambulesque de traiter les choses⊠Par rĂ©action, lâannĂ©e suivante, jâai tournĂ© Le Roi de CĆur, une farce tragique, totalement baroque, Ă©crite avec Daniel Boulanger et Marcel Dalio lâhistoire dâune petite ville du Nord, pendant 14-18, dĂ©sertĂ©e par ses habitants mais envahie par les fous de lâasile⊠Le film Ă©tĂ© un bide noir⊠Peut-ĂȘtre lâai-je un peu raté⊠En tout cas, jâavais demandĂ© Ă Georges de jeter une oreille du cĂŽtĂ© de la musique expressionniste, de Kurt Weill. Il mâa pondu une belle valse fragile, dĂ©glinguĂ©e, qui part en dissonances. Comme une boĂźte Ă musique qui ne tourne pas rond⊠Câest un mĂ©lange de fĂȘlure, de nostalgie, de petit manĂšge intĂ©rieur⊠Depuis des annĂ©es, je nâĂ©cris pas un scĂ©nario sans Ă©couter carrĂ©ment la Messe en si de Bach ou une symphonie de Beethoven. Dâun point de vue dramaturgique, leur structure me fascine. Jâaime comment Beethoven expose discrĂštement le thĂšme au dĂ©but de la symphonie, lâescamote, le fait revenir, le dĂ©veloppe en mineur ou majeur, en andante ou presto. En termes de construction, jâapprends Ă©normĂ©ment de Bach ou Beethoven⊠Au cinĂ©ma, la musique mâaide aussi Ă la structure. Lâapport de Georges Ă©tait autant musical que scĂ©naristique. A ce titre, la fin de Cartouche est exemplaire VĂ©nus Claudia Cardinale vient de mourir, Cartouche met son corps dans un carrosse quâil pousse, la nuit, dans un lac⊠Sur les images du carrosse dâor qui sâenfonce dans les eaux noires, Georges reprend Ă lâorchestre le thĂšme de VĂ©nus et Cartouche mais en mineur, sur un rythme de marche lente, quasi-funĂšbre⊠Comme une Ă©vocation du temps du bonheur, une maniĂšre dâintensifier le souvenir de VĂ©nus dans la mĂ©moire de Cartouche. Câest terriblement vibrant, ça vous fait monter les larmes⊠En réécoutant toutes ces musiques, ce sont aussi des images de Georges en studio qui me reviennent en tĂȘte Davout, bien sĂ»r, mais aussi la salle Wagram, qui servait le week-end de salle de boxe. Delerue sâenthousiasmait Lâacoustique est vraiment formidable ! » alors quâil dirigeait depuis un ring ! rires Je profitais de ces sĂ©ances pour observer le monde des musiciens qui mâa toujours fascinĂ© ils jouaient du Delerue en Ă©tat de grĂące, dans la beautĂ© de leur art. Mais dĂšs la fin de la prise, ils se mettaient Ă jacasser du tiercĂ©, de la SĂ©cu, de leur dĂ©jeuner Putain, le cĂ©leri rĂ©moulade mâa foutu des aigreurs dâestomac ! » rires Moi, jâadore ça le tĂ©lescopage du sublime et du trivial. Parmi les solistes, toujours des musiciens de lâOpĂ©ra de Paris, jâavais repĂ©rĂ© une petite vieille, toute cassĂ©e, derriĂšre sa harpe câĂ©tait la grande Lily Laskine. Georges lâadorait et lâemployait quasi-systĂ©matiquement, mĂȘme si elle finissait par avoir des problĂšmes de vue et de surditĂ©. Un jour, pour lui rendre hommage, jâai apportĂ© du champagne en studio. On a trinquĂ© Ă la fin de la sĂ©ance. Lily Laskine a bu quatre coupes, avant de repartir en titubant, me soufflant Ă lâoreille Ah, je nâai plus mes cordes pour me rattraper ! » Jâai vraiment gardĂ© un souvenir magique de ces enregistrements je me dĂ©plaçais beaucoup, de la cabine Ă la salle, je me planquais dans un coin pour observer Georges agiter ses grands bras dans lâimmensitĂ© du studio. RĂ©guliĂšrement, il se retournait vers moi, interrogateur Ca te va, Philippe ? » LĂ , jâavais le sentiment que tout Ă©tait exclusivement organisĂ© pour mon menu plaisir. Comme si Delerue Ă©tait un artisan du Roi dont lâobjectif suprĂȘme Ă©tait de le contenter. Je suis trĂšs fĂ©odal, jâadorais cette situation ! Et puis, Georges mettait tellement dâĂ©nergie, dâimplication Ă diriger ses musiciens, Ă leur faire sortir la musique quâil avait en tĂȘte⊠Quand toute cette Ă©motion, soulevĂ©e par un seul bonhomme, venait Ă©pouser mes petites images, jâavais la chair de poule. Câest toute la magie de la musique au cinĂ©ma des effluves de lyrisme qui font sâenvoler deux cabots qui se disent Je tâaime » sur un Ă©cran de contrĂŽle⊠VoilĂ pourquoi Delerue mâĂ©tait si cher parmi les ingrĂ©dients dâun film, sa musique exprimait plus que tout autre les profondeurs de lâĂąme. Pendant dix ans, des Jeux de lâAmour aux Caprices de Marie, mes films ont Ă©tĂ© co-Ă©crits par Daniel Boulanger et mis en musique par Georges Delerue. Comme le rĂ©sultat dâune symbiose Ă trois⊠JâĂ©tais au centre, encadrĂ© par deux auteurs qui intervenaient aux deux extrĂ©mitĂ©s de la chaĂźne. Je pensais âet je pense toujours- quâils avaient plus de talent que moi ! rires Boulanger, en particulier, me fascinait et me terrorisait je le trouvais intellectuellement plus original, plus inventif que moi-mĂȘme. JâĂ©tais influencĂ© par sa personnalitĂ©, par son sens du baroque, par ses trouvailles humoristiques ou poĂ©tiques. Trouvailles que jâacceptais car il me dominait. Câest tout le drame de ma vie jâai le sens de la grandeur mais sans avoir de gĂ©nie. Il me faut des collaborateurs pour me tirer⊠Georges, lui, une fois le film tournĂ©, me ramenait Ă lâessentiel, Ă ce que je voulais exprimer la vie, avec ses drĂŽleries, ses renoncements, ses petits dĂ©sespoirs ou ses grands chagrins, le tout enveloppĂ© de lĂ©gĂšreté⊠car il sâagit dâabord de comĂ©dies, ce qui est de ma part une courtoisie ou une lĂąchetĂ©. Le dĂ©but des annĂ©es soixante-dix a marquĂ© la fin de notre trio. AprĂšs Les Caprices de Marie, je ne travaillerai plus avec Boulanger⊠sauf pour Chouans !, en 1987, qui est lâaboutissement dâun vieux projet Ă©laborĂ© des annĂ©es plus tĂŽt. Quant Ă Georges, notre collaboration allait se poursuivre mais de maniĂšre plus discontinue. Curieusement, mon premier film sans Boulanger a aussi Ă©tĂ© mon premier film sans Georges La Poudre dâEscampette, Ă©crit par Jean-Loup Dabadie, en 1971. AprĂšs neuf longs-mĂ©trages, je nâavais pas de scrupule Ă abandonner ponctuellement lâami Delerue. CâĂ©tait une infidĂ©litĂ©, pas une trahison. De son cĂŽtĂ©, il travaillait sans arrĂȘt, pour des tas dâautres metteurs en scĂšne⊠Au dĂ©part, je croyais naĂŻvement que nous aurions encore plus de plaisir Ă refaire Ă©quipe sur le film dâaprĂšs⊠En rĂ©alitĂ©, câest plutĂŽt lâinverse qui sâest produit. Vous desserrez des liens que vous ne retrouvez plus Ă lâidentique⊠Quand le trio sâest reformĂ© pour Chouans !, il Ă©tait dĂ©jĂ trop tard. Trop de temps avait passé⊠Je nâai plus retravaillĂ© avec Boulanger, que jâai depuis complĂštement perdu de vue, je nâai plus revu Georges qui nous a quittĂ©s quatre ans plus tard⊠MĂȘme si je suis orphelin des deux, je souffre moins de lâabsence de Delerue il nâest plus avec nous. Alors quâil suffirait dâun coup de fil Ă Boulanger⊠silence Pour en revenir Ă La Poudre dâEscampette, jâavais voulu confier la musique Ă Jean Wiener. Car il y avait une idĂ©e marrante Ă creuser que mes trois personnages, perdus en Lybie en 1943, entendent de lâaccordĂ©on, du piano parisien, du jazz zazou au fin fond du dĂ©sert⊠Et je voulais faire Ă©crire cette musique par un compositeur historiquement liĂ© Ă lâĂ©poque Ă©voquĂ©e. Donc Jean Wiener. Mais ça sâest trĂšs mal passĂ©, surtout Ă lâenregistrement il nâavait rien prĂ©parĂ©, il sâest mis Ă improviser au piano, pendant que son arrangeur besognait dans un coin⊠Le rĂ©sultat ne ressemblait pas Ă grand-chose. JâĂ©tais catastrophĂ©, le producteur Alexandre Mnouchkine encore plus. Wiener me donnait lâimpression dâun monsieur trĂšs ĂągĂ©, assez fatiguĂ©, pas impliquĂ©. Ce qui nâenlevait rien au prestige de ses grandes partitions. Simplement, jâarrivais trop tard⊠Jâai Ă©tĂ© contraint de remercier Jean Wiener, qui a dĂ» me dĂ©tester, et dâappeler Ă la rescousse mon cher Delerue, pour tout reprendre Ă zĂ©ro. Et lĂ , Georges mâa rĂ©pondu DĂ©solĂ©, Philippe, je ne peux pas passer aprĂšs Jean ! » CâĂ©tait une belle preuve dâhonnĂȘtetĂ© il aimait beaucoup Wiener, dâun point de vue musical, humain et politique. Avaient-ils Ă©tĂ© compagnons de cellule au Parti Communiste ? Je lâignore⊠rires Finalement, câest Michel Legrand qui est venu Ă mon secours. Mais il me restera Ă vie le douloureux souvenir de cette sĂ©ance avec Wiener, comme une espĂšce de punition Ă mon infidĂ©litĂ©. Du coup, Georges est revenu dĂšs le film suivant, ChĂšre Louise, avec Jeanne Moreau, un drame de la solitude signĂ© Dabadie lâhistoire dâun amour impossible entre une vieille fille quadragĂ©naire et un jeune homme. Je nâaime pas beaucoup le film, je lui prĂ©fĂšre la musique, surtout le thĂšme principal pour piano et cordes. Jâen ai dâailleurs abusĂ©, je lâai placĂ© partout, sur des plans dâenvols de cygnes sur le lac dâAnnecy. Ca devient presque du formalisme⊠Avec ChĂšre Louise, je nâĂ©tais pas dans mon univers. De toute façon, je suis moins Ă lâaise avec les sujets frontalement graves ou dramatiques. Câest aussi valable avec Chouans !, fresque sur les dĂ©chirements de la RĂ©volution Française⊠Ma dĂ©marche est plutĂŽt de raconter des histoires superficielles ou fantaisistes qui, au dĂ©tour du chemin, lorgnent sur la tragĂ©die. Et non lâinverse. Ce qui nâa pas empĂȘchĂ© Delerue de rĂ©ussir ses musiques pour mes films sĂ©rieux ». La partition de Chouans ! ne manque ni de souffle, ni dâampleur⊠Sur mes comĂ©dies, il Ă©tait toujours dâune grande qualitĂ© dâinspiration, quâelles soient ratĂ©es Julie Pot-de-Colle, semi-rĂ©ussies LâIncorrigible ou rĂ©ussies Tendre Poulet. Il y a aussi Le Cavaleur, lâun de mes films prĂ©fĂ©rĂ©s, oĂč Rochefort incarne un pianiste concertiste qui court aprĂšs ses femmes, aprĂšs sa vie, aprĂšs le temps qui passe. LĂ , Georges mâavait servi de conseiller musical en mâindiquant un concerto pour piano de Beethoven Tu verras, il correspond bien au mouvement du film et du personnage ! » MalgrĂ© tout, pour la derniĂšre sĂ©quence, on a hĂ©sitĂ© entre le fameux concerto et une musique originale. En invoquant des raisons dâhomogĂ©nĂ©itĂ©, Delerue mâa convaincu de choisir⊠Beethoven ! Quâil a lui-mĂȘme spĂ©cialement arrangĂ© et dirigĂ© pour le film. LĂ au moins, il ne sâagissait pas dâune infidĂ©litĂ© avec lâun de ses concurrents ! Le Cavaleur doit ĂȘtre le dernier film sur lequel on ait travaillĂ© avant son exil amĂ©ricain⊠Gagnant de lâargent, un Oscar en poche, il est parti vivre Ă Los Angeles en 1981. Quelle Ă©volution depuis le Delerue que jâavais connu en 1959, celui qui bouffait de la vache enragĂ©e et vivait dans un deux-piĂšces Ă Pigalle, pas loin du quartier Ă putes. Son piano occupait tout lâespace de lâappartement le clavier dans la premiĂšre piĂšce, la demi-queue dans la seconde ! Vingt ans plus tard, le voilĂ intronisĂ© Ă Hollywood⊠CâĂ©tait tout le paradoxe de Georges un enfant de Roubaix, fils dâouvriers, compagnon de route du PC, qui se retrouve installĂ© dans le symbole mĂȘme du capitalisme amĂ©ricain. OĂč il vivait trĂšs heureux, dâailleurs⊠Si jâavais rĂ©ussi aux Etats-Unis, jâaurais peut-ĂȘtre fini comme lui, au bord dâune piscine californienne ! Entre Georges et moi, il nây a pas eu de rupture, simplement un Ă©loignement progressif. Jâhabitais Paris, lui Los Angeles⊠On avait chacun nos vies, sĂ©parĂ©es par quelques milliers de kilomĂštres⊠On sâest toutefois retrouvĂ© sur deux films, LâAfricain et Chouans !. Pour le premier, Georges Ă©tait revenu en France on a donc renouĂ© avec nos vieilles habitudes. Car mon bonheur, câĂ©tait dâaller chez lui, prĂšs du lac dâEnghien, lâĂ©couter me proposer des thĂšmes, dans son salon meublĂ© faux Louis XIII. LĂ , je lui avais dit Je voudrais une ouverture qui coule comme un grand fleuve africain, vaste, boueux, irrĂ©mĂ©diable⊠» Il sâest mis Ă son clavier et, dĂ©jĂ , je visualisais sa musique⊠En revanche, sur Chouans !, jâai dĂ©testĂ© la maniĂšre dont nous avons travaillĂ©. Tout sâest passĂ© entre Paris et Los Angeles, au tĂ©lĂ©phone Tiens, jâai un thĂšme, Ă©coute ! » Et jâentendais dans lâĂ©couteur un piano nasillard, venu de lâautre bout du monde, doublĂ© par une voix cassĂ©e qui chantait faux. Eu Ă©gard Ă notre vieille complicitĂ©, je lui ai fait entiĂšrement confiance, pour vraiment dĂ©couvrir le rĂ©sultat au studio Davout, Ă Paris, le jour de lâenregistrement. La musique Ă©tait formidable⊠mais je nâai pris aucun plaisir Ă sa conception. A partir de lĂ , je nâai plus contactĂ© Georges pour mes films suivants. Jâavais un chagrin dâamitiĂ© et besoin de lui, il Ă©tait loin, je lâai engueulĂ©. Et puis, pour lui, composer pour un film français Ă©tait un exercice particulier, presque une rĂ©gression. Ca lâagaçait de devoir Ă nouveau travailler avec nos mĂ©thodes, nos moyens. Je pense quâil avait lâimpression de faire marche arriĂšre⊠Dans son comportement, je devinais une certaine exaspĂ©ration pour les musiciens français, leur cĂŽtĂ© Ă la bonne franquette », sympas mais non disciplinĂ©s. Georges connaissait lâultra-professionnalisme des orchestres hollywoodiens, le luxe des budgets musique allouĂ©s par la Fox ou la Paramount. Alors forcĂ©ment⊠Quand vous vivez dans deux-cent mĂštres carrĂ©, vous avez du mal Ă revenir habiter votre vieille chambre de bonne, mĂȘme si elle contient tous vos souvenirs de jeunesse. Chouans ! a donc Ă©tĂ© notre ultime rendez-vous on a continuĂ© Ă se parler mais sans jamais se revoir. Georges est parti en mars 1992. En pleine nuit, vers trois heures du matin, un journaliste radio mâa appelĂ© pour mâapprendre la nouvelle⊠et mâinterviewer. Quelle Ă©lĂ©gance recueillir Ă brĂ»le-pourpoint un sentiment sur un frĂšre dont la mort mâanĂ©antissait⊠Quelques semaines plus tard, on mâa proposĂ© dâorganiser un feu dâartifice aux Vaux-de-Cernay, un chĂąteau construit par les Rothschild au XIXĂšme siĂšcle, autour dâune abbaye romane. Pour rendre hommage Ă Georges, jâai dĂ©cidĂ© de concevoir cette illumination avec et sur sa musique, en lâoccurrence celle de Chouans ! et Dien Bien Phu, le film de mon ami Schoendoerffer, avec son fameux Concerto de lâAdieu. Jâai travaillĂ© pendant un mois avec la maison Ruggieri, descendants de lâartificier de Louis XIV. Câest trĂšs compliquĂ© il y a un dĂ©calage Ă prĂ©voir entre le lancement du feu et son explosion⊠Le tout sans perdre le synchronisme avec la musique. Le soir mĂȘme, jâĂ©tais dans un Ă©tat de tension et dâĂ©motion extrĂȘmes. La femme de Georges, Colette, Ă©tait prĂ©sente et jâai bien lâimpression quâelle Ă©tait en larmes, comme moi. Le feu dâartifice a commencĂ©, lâassemblĂ©e sâest tue, captivĂ©e. Jâai enflammĂ© lâabbaye, le chĂąteau, la forĂȘt. Tous ces feux partaient vers le ciel, lĂ oĂč Georges venait dâarriver. Il mâavait offert sa musique, je la renvoyais Ă travers les Ă©toiles. Tout cela ressemblait Ă la vie et au cinĂ©ma un spectacle Ă©phĂ©mĂšre et coĂ»teux, nĂ©cessaire et inutile. Comme un mirage qui a existĂ© le temps de quelques minutes⊠et dont ne subsiste que le souvenir chez les spectateurs prĂ©sents ce soir lĂ . CâĂ©tait un adieu, mon adieu, Ă Georges Delerue. Propos recueillis par StĂ©phane Lerouge
S7vEcDx.